Farès Souhaid : Monsieur le Président, les Libanais ne sauraient être opprimés

L’ancien député s’insurge contre la répression de la liberté d’expression
C’est une véritable bataille pour la défense de la liberté d’expression et de la liberté de l’action politique que vient de lancer Farès Souhaid, ancien député et président du Rassemblement de Saydet el-Jabal qui vient de se voir refuser l’accès à l’hôtel Le Bristol pour y tenir une réunion politique dans le cadre de sa conférence annuelle prévue pour le 7 octobre, sur le thème « Libérer la décision nationale libanaise de la tutelle iranienne pour la préservation de la Constitution et du vivre ensemble ».

La réservation, qui avait été confirmée par mail le 28 septembre, a été annulée en dernière minute, sans justification. Il s’agit du second refus opposé par l’hôtel en question qui avait également renoncé à accueillir une réunion du 14 Mars au début de la crise syrienne, en 2011.

Dans un communiqué de presse publié lundi, Saydet el-Jabal a dénoncé « une atteinte grave à la liberté d’expression et à la liberté de l’action politique des individus et des groupes ». M. Souhaid a pour sa part affirmé que le titre choisi pour la conférence a vraisemblablement « dérangé certains services ou forces politiques qui ont fait pression sur l’administration de l’hôtel ». Et de poursuivre : « Supposons que le thème de la libération du Liban de la tutelle iranienne ait pu gêner une partie quelconque, où est donc l’État dans cette affaire ? Et que fait le gouvernement ? » s’est interrogé l’ancien député.

M. Souhaid a poursuivi sur sa lancée en enchaînant les Tweet pour dénoncer les « atteintes graves à la liberté d’expression », assurant que le Rassemblement ne lâchera pas prise et qu’il tiendra coûte que coûte sa conférence. « Nous avons promis de continuer à faire entendre notre voix », a tweeté M. Souhaid, ajoutant : « Nous demandons et insistons à ce que la tutelle iranienne sur le Liban soit levée, en vue de préserver la Constitution et le vivre ensemble. » L’ancien député a assuré à L’OLJ que la conférence se tiendra inéluctablement à Beyrouth, une ville qui peut accueillir tous les avis. « Dans la capitale, on retrouve des Libanais qui défendent les armes du Hezbollah, mais aussi des Libanais qui considèrent que cet arsenal nuit non seulement à la convivialité islamo-chrétienne, mais également à la convivialité sunnito-chiite. »

La « mainmise de l’Iran »

Le 10 septembre dernier, au moment où le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) entamait l’étape des plaidoiries finales dans l’affaire de l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri (14 février 2005), le Rassemblement de Saydet el-Jabal a estimé que le tribunal représente « un tournant essentiel dans la vie de la région ». La Rencontre de Saydet el-Jabal, du nom du couvent à Fatqa qui l’avait abritée sous l’occupation syrienne, est une plateforme nationale de réflexion et de dialogue annuel, autour de la question libanaise. Le Rassemblement, qui regroupe des personnalités politiques et des intellectuels chrétiens, est réputée pour ses prises de position en faveur de la souveraineté, de l’État de droit et du respect de la Constitution, mais aussi pour ses positions en flèche à l’encontre du Hezbollah et de la « mainmise de l’Iran » sur le Liban.

« Tout est permis sauf l’exercice d’une action politique sérieuse, pacifique et démocratique », a martelé M. Souhaid. L’ancien député a saisi l’occasion pour dénoncer les « tentatives de museler des activistes sur les réseaux sociaux », qui, a-t-il dit, « sont traînés devant les enquêteurs pour un oui ou pour un non ».

S’adressant dans un autre Tweet au chef de l’État, Michel Aoun, l’ancien député a affirmé : « Monsieur le Président, vous vous trompez lourdement, car les Libanais ne sauraient être opprimés. » Enchaînant sur le même ton, l’ancien député s’en est également pris à ceux qui « sont empêchés de présenter un document politique bien étudié, alors que l’on permet à certains de lancer des insultes sur les écrans de télévision en vue d’humilier les gens », dans une allusion aux invectives lancées par Joseph Abou Fadel à l’adresse de la députée Paula Yacoubian (lire par ailleurs). « Vous devriez avoir honte d’autant que le monde entier vous observe », a-t-il martelé.

Pour sa part, l’ancien ministre Achraf Rifi a stigmatisé « la pression » exercée en vue d’annuler la conférence de Saydet el-Jabal, ainsi que la campagne de « diffamation menée à l’encontre de journalistes femmes ». « Nous vivons à l’ère d’un mandat d’assujettissement à l’Iran et à ses acolytes qui s’en prend aux libertés des Libanais », a conclu M. Rifi.

Jeanine JALKH | OLJ 03/10/2018