APPEL DES FORCES DU 14 MARS

وثائق 14 آذار
3 تموز 2011

Bristol, 
03-07-2011

 

« Libanais, 
L’heure de la vérité et de la justice a sonné 
« Vous avez tenu à vivre libres. Ce faisant, vous avez arraché votre droit et celui de vos martyrs à la justice.
« La justice est la garantie de votre stabilité et de votre indépendance. Elle constitue aussi un droit reconnu par les religions célestes et la Charte internationale des Droits de l’Homme. Nous n’acceptons pas que d’aucuns nous imposent une équation injuste et immorale, selon laquelle la justice constituerait une menace pour la paix civile et qu’elle serait inapplicable au Liban, même dans plusieurs siècles.
« La vérité, toute la vérité, est qu’une acceptation du principe de l’impunité, qui a dominé notre vie politique pendant des décennies, consoliderait la règle de la légitimation de l’assassinat politique et menacerait donc la paix civile et la coexistence.
« Notre demande de vérité et de justice dans l’affaire de l’assassinat du premier ministre martyr Rafic Hariri et des autres martyrs sert la cause d’un Liban stable et installé dans une paix durable. La justice représente une garantie et un espoir pour tous les Libanais, et elle  ne défie que les criminels. La justice, surtout lorsqu’elle est rendue par des personnes capables et dignes de confiance, est aujourd’hui notre principal moyen de protéger le Liban et d’empêcher qu’il ne revienne à la situation qui était la sienne avant la révolution du Cèdre en 2005, au moment même où les peuples arabes abattent les murs de leurs prisons et se réveillent à la liberté et à la dignité.
«Les vagues d’assassinats politiques, de meurtres, d’attentats et de terrorisme que le Liban a connues n’auraient jamais atteint une telle ampleur sans l’existence d’un environnement propice au développement du recours aux armes illégales. 
L’accord de Taëf avait mis l’accent sur la nécessité de mettre un terme à ce phénomène et de rétablir le prestige des composantes militaire et sécuritaire de l’Etat, en consacrant le principe du monopole des armes. La multiplication des violations de ce volet de l’accord de Taëf a fini par remettre le pays à la merci de ces mouvements armés qui jouent concrètement le rôle du partenaire qui dérobe à l’État et à ses institutions légales leurs responsabilités sécuritaires, militaires et judiciaires.
« Après toutes ces amères expériences, il n’est plus acceptable que les armes non légales continuent d’exercer leur tutelle sur l’État dans l’exercice de ses responsabilités nationales.
 « Vous êtes aujourd’hui face à un gouvernement qui ne s’est pas contenté de se retourner contre la démocratie, mais qui est allé aussi jusqu’à dénier, dans son projet de déclaration ministérielle, la demande de justice à l’égard de laquelle l’État avait pris des engagements auprès du peuple libanais et de la communauté internationale dans les précédentes déclarations ministérielles, notamment sous les gouvernements des présidents Fouad Siniora et Saad Hariri. Ceux qui se dérobent aujourd’hui sont ceux-là mêmes qui avaient avalisé ces déclarations ministérielles. 
« Mais le plus dangereux dans cette orientation gouvernementale ne réside pas dans ce déni de justice. Il est plutôt dans le fait d’exprimer son inimitié envers les citoyens et les proches des martyrs, en faisant fi de leur dignité et du sang versé. Le plus dangereux réside dans le fait de pousser l’État libanais hors de la légalité internationale pour en faire un État paria. Cela porte préjudice à tous les Libanais, sans exception, quelles que soient leurs projets et affiliations politiques.
« En notre qualité d’opposition nationale et démocratique, et après ce que nous avons entendu hier et qui relève de la logique de la suprématie des armes imposée à tous les Libanais et qui montre que le gouvernement est soumis à cette logique, nous réclamons du Premier ministre de proclamer mardi matin devant la Chambre, de manière franche et directe, son engagement à l’égard de la résolution 1757 et des mesures exécutoires qui s’ensuivent, ou alors de partir, lui et son gouvernement, sans que nul ne les regrette.
« Parce que ce gouvernement est, avec son chef, ses membres réunis et toute personne qui s’assoit à sa table, un gouvernement de putsch contre les Libanais qui ont obtenu de haute lutte le droit à la justice et à la vérité, et qui voient dans le tribunal international l’instance habilitée et compétente pour réclamer des comptes aux responsables de la vague terroriste qui a visé le Liban et ses symboles nationaux, nous ne braderons pas le sang du président-martyr Rafic Hariri, de Bassel Fleyhane, de Georges Haoui, de Samir Kassir, de Gebrane Tuéni, de Pierre Gemayel, de Walid Eido, d’Antoine Ghanem, de Wissam Eid, ni celui des martyrs-vivants Marwan Hamadé, Elias Murr et May Chidiac, ou celui des 68 martyrs parmi les civils.
« Libanais, 
« Nous vous invitons à rester attachés aux fondements de la révolution du Cèdre et à ses objectifs de liberté, de dignité et de justice, aux côtés des masses populaires qui ont rejeté la tutelle et qui refusent l’oppression, l’aliénation, et les occupations de l’intérieur et de l’extérieur.
« Les forces du 14 Mars demeurent déterminées à obtenir la mise en œuvre de toutes les résolutions internationales, en particulier la 1757 dans toutes ses implications, et s’engagent à ce qui suit : 
« 1 – Faire face au processus de destruction de la coexistence, de l’État et du système politique, qui a commencé avec la mainmise armée sur la capitale en 2008, et s’est poursuivi et accentué malgré l’accord de Doha, la victoire du 14 Mars aux législatives de 2009, les gouvernements d’union nationale, et nos efforts permanents pour promouvoir les impératifs de la réconciliation nationale. Nous continuerons la lutte jusqu’à briser cette suprématie établie par les armes.
« 2 – Entamer l’action pour faire chuter ce gouvernement, qui est le fruit d’un putsch, et ce dès mardi si le Premier ministre ne s’engage pas à mettre en œuvre la résolution 1757, comme indiqué précédemment.
« 3 – Lancer une campagne politique arabe et internationale dans le but de sauver la République de l’emprise des armes et demander aux gouvernements arabes et à la communauté internationale de ne pas coopérer avec ce gouvernement en cas de non-application des dispositions de la 1757.
« 4 – Le 14 Mars prendra toutes les mesures pacifiques qu’il jugera nécessaires pour préserver le sang des martyrs de la révolution du Cèdre et l’avenir de la justice et de la jeunesse au Liban.
« 5 – Les parties réunies se déclarent en session ouverte et décident de former un comité d’urgence chargé de suivre les développements et prendre les mesures adéquates. 
« Nous étions favorables au Tribunal spécial pour le Liban et nous le resterons afin que justice soit faite et pour préserver la dignité et le droit des Libanais, morts et vivants, et dans le but de préserver aussi la vie politique face à la pratique des assassinats. Non au gouvernement du Hezbollah. Oui à la liberté et à la justice. Oui à la coexistence, la démocratie et la Constitution. Gloire au Liban et éternité pour nos martyrs”.